La vente de carburant à perte autorisée pour six mois : un coup de pouce pour les consommateurs ?

Face à la flambée des prix du carburant, le gouvernement français prévoit de prendre des mesures exceptionnelles.

Dans une interview au Parisien, Élisabeth Borne promet d’obtenir des résultats concrets sans subventionner le carburant et annonce l’autorisation de vendre à perte pendant six mois. Comment cette mesure va-t-elle se traduire dans la pratique ? Quel impact aura-t-elle sur les stations-service non affiliées aux grandes surfaces ?

Vente à perte de carburant : qu’est-ce que cela signifie concrètement ?

Avec cette décision, les distributeurs auront le droit de vendre leur carburant à un prix inférieur à celui d’achat. Selon Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, cette différence pourrait atteindre presque 50 centimes par litre. Cependant, il précise que cette baisse ne s’appliquera pas forcément à toutes les stations pendant toute la durée de l’autorisation.

Pour Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes au Parlement, si cette mesure est appliquée avec une réduction de 25% par rapport au prix d’achat, elle peut entraîner jusqu’à 47 centimes d’économies par litre d’essence. Il considère cette mesure comme un « geste significatif » en faveur des consommateurs, qui pourront-ils bénéficier de la baisse des prix dès octobre.

  • Les supermarchés avec une station-service pourraient être les premiers à adopter cette mesure comme un argument marketing
  • Un gain potentiel de 25% par rapport au prix d’achat du carburant
  • Pas de risque d’effet de rattrapage, selon Olivier Véran

Quelle répercussion pour les stations-service indépendantes ?

Dans une interview accordée au Figaro, le président national des gérants de stations-service et énergies renouvelables de Mobilians estime qu’il sera impossible pour les stations non affiliées aux grandes surfaces commerciales de s’aligner sur ces prix. Ces stations, représentant environ 5800 sites en France, ne disposent pas des moyens financiers leur permettant de supporter les pertes engendrées par la vente à perte.

Or, sans soutien de l’État, ces stations seront condamnées, met en garde le représentant professionnel. Les stations situées en milieu rural sont particulièrement à risque si elles ne bénéficient pas d’une compensation financière. Une mesure que le gouvernement pourrait façonner sous forme de fonds de transition énergétique destiné à accompagner ces stations dans leur diversification vers la mobilité électrique ou autres services dédiés aux consommateurs.

Le point de vue des acteurs du secteur pétrolier

De son côté, TotalEnergies, qui gère le tiers des stations-service françaises, a annoncé maintenir un plafond de 1,99 euro par litre pour l’essence et le diesel jusqu’à la fin de l’année 2023. Les chaînes de supermarchés se sont également engagées à accorder des réductions sur les prix du carburant dans leurs stations.

Cette approche n’est cependant pas partagée par BP et Esso, qui ont été rachetées par des enseignes françaises hors du secteur pétrolier. Leurs marges ne leur permettraient pas de vendre à perte, et sans alignement sur les prix d’autres distributeurs, ils risquent de voir leur clientèle délaisser leurs stations au profit des grandes surfaces. L’autorisation exceptionnelle de vendre du carburant à perte pendant six mois est une mesure forte pour soulager le porte-monnaie des consommateurs français.

Toutefois, elle soulève des questions quant à son impact sur les stations-service indépendantes et celles appartenant à des compagnies hors du secteur néo-pétrolier. Dans ce contexte, il semble nécessaire que l’État apporte un soutien financier aux acteurs les plus fragiles afin d’éviter une concurrence déloyale et la disparition de ces petites structures au profil du mastodonte qu’est la grande distribution.